Anthony

L'essor de l'hydrogène

Un dossier parrainé par Le Livre des Tendances

Cet article est extrait du Livre des Tendances 2021,
22 secteurs clés décryptés (352 pages).


L'hydrogène semble avoir toutes les qualités pour être facilement et rapidement adopté par les conducteurs.

Bertrand Joubert : C'est le cas, en effet. Notre travail consiste à développer, produire et vendre des piles à hydrogène. Elles équipent des véhicules électriques et garantissent une mobilité zéro émission, une ressource naturelle sans limite et un temps de recharge extrêmement rapide. C'est une vraie révolution par rapport aux technologies existantes. Le sujet majeur reste de passer à l'adoption par le grand public. Il faut un grand soir du véhicule particulier à hydrogène.

Comment y arriver ?

B.J. : Il faut une offre élargie dans le portefeuille des constructeurs. Aujourd'hui, il n'y a pas encore de véhicules de grande série disponibles sur le marché, mais c'est en cours de développement.

Dans le même temps, pour apporter une nouvelle énergie sur les routes, il faut également proposer des infrastructures de recharge en nombre suffisant. Il faudrait plusieurs milliers de stations à hydrogène aux quatre coins du pays… Tout est une question d'usage et de taille de marché. L'hydrogène est adapté à des trajets plus longs que l'électrique. Ces deux motorisations sont complémentaires, mais pas concurrentes.

L'hydrogène est adapté à des trajets plus longs que l'électrique. Ces deux motorisations sont complémentaires, mais pas concurrentes.

Justement, où en sommes-nous en ce qui concerne le nombre de points de recharge et le nombre de véhicules à hydrogène en circulation ?

B.J. : Nous avons actuellement quelques centaines de véhicules sur les routes. Nous nous rapprochons des 500 unités, essentiellement concentrées sur des usages professionnels. Il y a une cinquantaine de stations de recharge en France.

Plusieurs régions jouent un rôle moteur, comme l’Auvergne-Rhône-Alpes, qui concentre les trois quarts des entreprises de la filière française, mais aussi l'Îl-de-France, la Normandie, l'Occitanie… C’est dans ces territoires qu'il y a un début de maillage. Le projet Zéro Émission Vallée, en région Auvergne, vise à déployer une trentaine de stations d'ici 2022, ce qui correspondra à une couverture tout à fait satisfaisante pour les professionnels.

Toyota Mirai à la technologie hydrogène ©Toyota

Quelles sont les ambitions de développement du secteur ?

B.J. : Il est tout à fait possible d'imaginer plusieurs dizaines de milliers de véhicules à hydrogène commercialisés chaque année en France avant la fin de cette décennie. Nos prévisions tablent sur environ 2 millions de véhicules à hydrogène produits chaque année dans le monde à l'horizon 2030.

L'hydrogène a été affirmé comme une filière stratégique par le plan gouvernemental présenté mi-2020. C'est un élément de réassurance fort pour tout le secteur, depuis les grandes entreprises jusqu'aux petites startups. Sans compter que l'État a débloqué un budget de 4 milliards d'euros.

Il faut accompagner le déploiement de cette énergie vertueuse. Pour que les usagers achètent les véhicules, il faut trouver des mécanismes d'incitation. Il faut également aider les industriels de la distribution d'énergie à accélérer la mise en place des stations.

Station hydrogène ©Toyota

Le marché pourrait donc connaître une croissance extrêmement forte ?

B.J. : Actuellement, la magnitude de notre activité est de l'ordre de quelques centaines d'unités de piles à hydrogène. D'ici trois ans, ce sera quelques milliers. D'ici six ans, quelques dizaines de milliers. À terme, notre objectif est d'atteindre plus de 200 000 unités produites tous les ans, c'est-à-dire environ 12 % de part de marché mondial.

Est-ce que l'hydrogène pourrait à terme permettre à la voiture de ne pas être remplacée par des modes de transport moins polluants ?

B.J. : La meilleure énergie est celle que l'on ne consomme pas. Dans l'avenir, l'heure sera à la rationalisation des usages. Néanmoins, il existe un certain nombre de fondamentaux qui font qu'il y aura toujours un besoin important de mobilité. À ce titre, la voiture de demain devra nécessairement être de plus en plus sobre. C'est la promesse de l'hydrogène.

Quels sont les futurs projets de Symbio ?

B.J. : Nous travaillons sur une pile nouvelle génération qui sera plus performante. Nous allons par ailleurs poser la première pierre d’une usine dans la région lyonnaise. Ce sera le vaisseau amiral de notre production industrielle et de notre ingénierie, et il sera opérationnel en 2023.

Parcours de Bertrand Joubert
Polytechnicien spécialisé en conception système et en management de l'innovation, il a été ingénieur en chef du département prototypes de Renault, avant de devenir senior consultant pour le cabinet de conseil Roland Berger. Nommé directeur commercial de Symbio en 2015, il en est devenu le directeur général adjoint l'année suivante, avant d'occuper la fonction de vice-président à partir de novembre 2019.