Cet article est extrait du Livre des Tendances 2021,
22 secteurs clés décryptés (352 pages).
Comment est née myfood ?
Mathieu Urban : Nos grands-parents jardinaient, nos parents, un peu, nous, plus du tout… En l'espace de trois générations, nous sommes devenus incapables de faire pousser notre nourriture.
Pour aborder ce problème, nous avons mis au point un système de culture qui répond à trois enjeux essentiels, le manque de connaissances, le manque de temps et le manque de place pour les urbains. Nous avons développé un outil de production alimentaire très simple à mettre en œuvre, qui permet à une famille de quatre personnes d'être quasiment autonome toute l'année en fruits et légumes grâce à une parcelle de 22 mètres carrés. Nous proposons un panel de solutions qui vont des jardins verticaux aux serres connectées.

Nous pensons que le changement vers des modèles plus responsables ne viendra pas de l'agriculture, car les schémas ont plutôt tendance à empirer avec l'augmentation des produits phytosanitaires, la concentration agricole, la bétonisation des sols, et la chute de la biodiversité…
En l'espace de trois générations, nous sommes devenus incapables de faire pousser notre nourriture.
Comment fonctionne votre solution ?
M.U. : Nous combinons l'aquaphonie et la permaculture avec l'Internet des objets. Les serres connectées sont très simples d'utilisation. Elles sont installées par nos soins chez les particuliers. Une application permet de piloter à distance les cultures et de recevoir des conseils pour optimiser le rendement.
Pour ce qui est des jardins verticaux, ils nécessitent seulement 1 m2 d’espace, un peu d’eau et de soleil. Nous les avons pensés pour le grand public. Tout ça mis ensemble fait que n'importe qui peut prendre facilement la main sur ses cultures pour faire pousser l'équivalent de 300 à 400 kilos de légumes par saison, en partant de zéro. Les connaissances requises peuvent être acquises en très peu de temps.

N'importe qui peut prendre facilement la main sur ses cultures pour faire pousser l'équivalent de 300 à 400 kilos de légumes par saison, en partant de zéro.
Votre solution permet-elle une réelle autonomie alimentaire sur les fruits et les légumes ?
M.U. : Elle apporte un degré d'autonomie plus ou moins avancé selon les végétaux. À titre personnel, je n'achète plus de salades, d'aromates, de choux, d'oignons, de tomates, de courgettes, et de haricots… Je réponds à 80 % de mon besoin. Pour les légumes racines, je suis entre 30 et 40 %.
Dans les bacs, il est également possible de faire pousser des carottes, des navets et des choux-raves, et de pratiquer la pisciculture. En moyenne, entre 60 et 80 % des besoins sont pourvus. Et tous nos dispositifs sont fournis en engrais biologique, garantis sans OGM.
Elle est donc également le gage d'une alimentation parfaitement naturelle ?
M.U. : Ça va même au-delà. Les aliments vendus dans la grande distribution, même chez les enseignes bios, manquent cruellement de fraîcheur. Les vitamines, les micronutriments et les fibres sont également très importants. Et il y a une problématique de déchets d'emballage. Le bio ne prend pas en compte ces aspects de la nutrition qui sont pourtant essentiels.
Vos clients sont plutôt des citadins sensibles à l'agriculture urbaine ou des ruraux ?
M.U.: Notre panel de clients est extrêmement large. Nous avons de jeunes familles qui font attention à leur alimentation, des retraités qui n'arrivent plus à jardiner, des entrepreneurs sensibilisés sur la transition écologique…
La moitié de notre activité provient des professionnels, restaurateurs, hôteliers, écoles et mairies… Nous avons également des promoteurs immobiliers qui veulent implanter l'autoproduction alimentaire en ville.
Quelles sont les prochaines étapes pour myfood ?
M.U.: Nous souhaitons généraliser le concept d'autoproduction alimentaire et développer notre notoriété. Aujourd'hui, nous comptons 300 serres déployées en France et à l'international. C'est une belle croissance. Le potentiel est juste fantastique. Nous allons accélérer notre implantation au Benelux, en Allemagne et au Québec… Nous sommes en train de nous développer au Québec, car la prise de conscience sur la souveraineté alimentaire est très forte, là-bas.
Parcours de Mathieu Urban :
Après une formation en management à l'Institut supérieur européen de gestion, il est devenu Marketing Product Manager puis Marketing Manager de Steelcase, une entreprise de design qui aide les individus à libérer tout leur potentiel dans leur vie professionnelle et qui a inscrit l'écoresponsabilité au cœur de son ADN. En 2015, il devient Managing Partner et président de myfood.